Nous vous emmenons vers l’une de nos aventures gourmandes de cette année, dans la région du Jura et des Trois Lacs où nous avons passé 3 jours à dénicher et goûter diverses spécialités culinaires locales.
La région du Jura et des Trois Lacs englobe le massif du Jura ainsi que les lacs de Neuchâtel, de Bienne et de Morat, d’où son nom. Pour les friands de géographie Suisse, cela recouvre les cantons de Neuchâtel, Berne, Soleure, Fribourg, Vaud et du Jura.
Si la région est d’abord connu pour son savoir-faire et ses grandes marques horlogères, elle possède de nombreuses spécialités culinaires parmi lesquelles la Tête de Moine ou l’Absinthe. Découvrez notre Top 5 des coups de cœur des spécialités du coin.
La Tête de moine
La tête de Moine est un fromage unique au monde par son mode de consommation sous forme de « rosettes » obtenues à l’aide d’une « girolle ». Inventée en 1981, la girolle est un appareil qui permet de faire des rosettes de Tête de Moine en faisant tourner un racloir sur un axe planté dans le centre du fromage. Avant son invention, le fromage était servi en raclant sa surface avec un couteau, dans un geste circulaire, pour en faire comme des copeaux.
Ce fromage à pâte mi-dure à croûte lavée, élaborée à partir de lait de vache cru et entier frais de montagne est protégé par une AOP. Originaire du Jura bernois, la région francophone du canton de Berne et du canton du Jura, il provient plus précisément de l’abbaye de Bellelay, aujourd’hui reconverti en hôpital psychiatrique. L’étable, en revanche, est aujourd’hui un musée dédié au fromage et à son histoire, où l’on continue à faire perdurer la fabrication du fromage dans un art des plus artisanales.
Aujourd’hui moins de 10 fromageries se partagent la production de ce fromage Suisse. L’une d’entre elle, la Ferme Lafleur propose une production bio et ce depuis 1978, faisant figure de pionnier dans le domaine. Ce couple de passionnés tient une chambre d’hôte permettant d’y faire une halte pour la visite de la fromagerie, et découvrir les secrets de leur fabrication artisanale, au chaudron en cuivre chauffé au feu de bois. Leur travail pour la sauvegarde de la fabrication à l’ancienne de la tête de moine est d’ailleurs reconnu par le Prix Slow Food en 2015.
La truite au bord du Doubs & Cueillette sauvage
La truite au bord du Doubs est une spécialité jurassienne qui doit naturellement son nom à la rivière qui marque la frontière entre la France et la Suisse. Cuite au feu de bois en pleine nature, en l’assaisonnant tout simplement avec sel, poivre et quelques herbes fraîches, et en le flambant au vin on met en valeur la saveur fine de sa chair. On y ajoute quelques noix de beurre au dernier moment pour transformer ce plat en un vrai festin.
La truite se déguste dans de nombreux restaurants de la région, mais pour une expérience plus insolite, nous sommes partis à la cueillette d’herbes sauvages en compagnie de Maria-Luisa Wenger. Cette herboriste qui se laisse vivre au rythme de la nature, est aussi une remarquable cuisinière. Et il faut croire que c’est de famille puisque son beau-frère, Georges Wenger, dirige les cuisines d’un restaurant 2 étoiles au Michelin, prestigieux établissement de la région et membre du réseau Relais & Châteaux.
Maria-Luisa propose ainsi via son site de vous retrouver pour une randonnée sauvage, à la recherche et à la découverte de plantes aromatiques dont elle connaît tous les secrets, pour terminer le tout par une cuisine orchestrée en pleine nature au feu de bois. Un vrai régal.
La torrée neuchâteloise et le jambon cuit à l’Asphalte
Le jambon cuit à l’Asphalte
Direction les anciennes Mines de la Presta pour y découvrir la cuisson du jambon cuit à l’asphalte. L’asphalte ? C’est en quelque sorte du bitume à l’état naturel, dérivée du pétrole, qui fut exploité par des ouvriers miniers jusqu’au milieu des années 80. Comme le laisse supposer son nom, le jambon cuit à l’asphalte n’a de spécifique que son mode de cuisson. Autrefois produit de fête préparé à l’attention des mineurs et de leurs familles, il est, depuis la fermeture des mines, devenu le plat typique du Café des Mines, situé à l’entrée de la Mine aux abords du village de Travers. On ne le trouve nulle part ailleurs en Suisse. Il est préférable d’appeler l’établissement avant de s’y rendre pour s’assurer des stocks, et mieux encore, passer un jour de cuisson !
En France, on retrouve la même tradition avec le gigot bitume. Un gigot enveloppé de papier kraft et cuit dans un bain de bitume en fusion. C’est une préparation traditionnelle lors de repas célébrant la fin du gros œuvre sur des chantiers de bâtiments ou de travaux publics.
En Suisse, on lui préfère donc le jambon. Celui-ci est tout d’abord désossé par le boucher puis roulé et mis en filet avant d’être salé et fumé à froid. Emballé dans plusieurs couches de papier de boucherie et solidement ficelé, le « paquet » obtenu est à son tour emballé dans un sac de farine. Le tout est alors placé dans un panier en métal et plongé dans une cuve contenant quelques 400 kg de bitume en fusion à 170°C environ. On compte environ 4h de cuisson, et presque autant pour le temps de chauffage de l’asphalte.
Ce curieux mode de cuisson permet, grâce à une température constante et une méthode d’emballage exclusive, de conserver tous les goûts et les arômes qui généralement s’évaporent ou se diluent, conférant ainsi au jambon une saveur incomparable.
La torrée neuchâteloise
Ce jour-ci, malheureusement, il n’y avait pas de cuisson de jambon de prévu. Mais voilà que nous nous réunissons aux alentours de la Mine autour d’un feu qui crépite pour assister à la préparation d’une autre spécialité, la torrée neuchâteloise.
La torrée, parfois appelée « feux de berger », est une tradition qui consiste à préparer un grand feu et à y faire cuire sous la cendre saucissons et pommes de terres ! Les saucisses sont enroulées dans une feuille de choux et du papier journal pour y mijoter dans leur jus. On recouvrait alors les braises de branches vertes de sapin qui produisaient une colonne de fumée blanche et odorante.
L’Absinthe
L’absinthe clandestine
Après ces diverses découvertes gastronomiques, il fallut bien penser à s’hydrater un peu. On s’échappe quelque peu dans les bois, et au détour d’une fontaine naturelle, on y découvre caché aux alentours une fée verte !
La fée verte, cette autre nom de l’absinthe, boisson longtemps interdite, et entourée de nombreux mythes et légendes. La boisson qui rend fou diront certains, ou la boisson source d’inspiration pour les autres et nombreux écrivains et artistes célèbres.
Pendant la prohibition, il était d’usage de cacher une bouteille en forêt près de sources d’eau naturelle. Aujourd’hui, certains font perdurer le rituel secret, symbole d’une résistance passée.
La maison La Valote Martin
Pour en apprendre plus, rendez-vous à la distillerie de La Maison des Chats, où l’on trouve le plus vieux séchoir à absinthe encore en activité. On y rejoint Philippe Martin de la maison La Valote Martin, distillateur de père en fils.
L’absinthe vit le jour dans les années 1760. Entre la culture des plantes, leur séchage et la distillation, l’absinthe contribua à l’essor de la vallée jusqu’à ce qu’en 1910, frappée par une interdiction votée deux ans plus tôt par le peuple suisse, elle fut contrainte de se faire souterraine. Un mythe était né et des dizaines de distillateurs clandestins allaient l’entretenir tout au long du 20e siècle. Francis Martin était de ceux-là. Lorsqu’en mars 2005, l’absinthe redevint autorisée, il décida d’en produire légalement, porté par l’envie de faire partager sa passion pour la fée verte et d’en conserver la distillation dans son berceau. Sa recette n’a pas changé. En 2014, son fils Philippe, reprend la distillerie et perpétue ainsi ce savoir-faire familial.
L’absinthe La Valote Fornoni au goût unique est obtenue par la composition de plantes médicinales, telles que: Grande Absinthe, Mélisse, Menthe Poivrée, Hysope etc. provenant de cultures du Val-de-Travers. La visite est l’occasion de découvrir son séchoir et son jardin aux 5 plantes composant en partie son absinthe artisanale. La distillation est effectuée artisanalement, selon une ancienne recette par un distillateur soucieux de perpétuer le mythe de la Fée Verte et de garantir la production d’une véritable absinthe de qualité supérieure.
La Maison de l’Absinthe
Avec la fin de son interdiction, La Maison de l’Absinthe incarne le symbole d’un renouveau. C’est dans cet ancien tribunal où l’on jugeait les distillateurs clandestins que s’est installé le musée de l’absinthe, avec expositions temporaires et permanentes, ateliers de cuisine, boutique avec un large choix et bien sûr, la possibilité de déguster un grand nombre d’absinthes, et même des cocktails.
Bonus #1 : Recette du Soufflé Mitterrand
En 1983 alors que l’absinthe est encore interdite, M. Aubert préside la Confédération Suisse et il invite son homologue français François Mitterrand à un repas à Neuchâtel. Le cuisinier de l’Hôtel du Peyrou où se déroulera le banquet, concocte un menu dont le dessert provoquera un mini raz-de-marée politique: un soufflé glacé à la Fée !
La Fée verte dans un dîner officiel… L’affaire fait immédiatement scandale, et s’en suit un procès de deux ans à charge contre le cuisinier. Las, le cuisinier, devant les juges, prétendra qu’il ne s’agissait pas d’absinthe, mais d’un vulgaire pastis. Quoiqu’il en soit, voilà un nouveau mythe qui est né, car selon les versions, on ne saura pas si François Mitterrand a goûté ou non, au malheureux dessert…
Retrouvez la recette => ici <=
Bonus #2 : Un sauna à l’absinthe, ça vous tente ?
Pour parfaire cette escapade, on termine notre journée au Grand Hôtel des Endroits qui surplombe la région avec une magnifique vue panoramique sur la région à 1111 mètres d’altitude. Et en son sein, un gigantesque espace Spa & Wellness comprenant pas moins de 7 saunas, un bassin d’intérieur et une piscine extérieure chauffée à 36°C avec massage à bulles.
L’occasion de terminer la journée dans le sauna aromatisé à l’absinthe, chauffé à 70-80°C, préparé spécialement par un anisetier de Couvet. On dit de ce sauna qu’il stimule la circulation et soutient le processus de purification, soigne la peau et les poumons. Nous, on veut bien les croire, l’endroit parfait pour se ressourcer.
Le Chocolat Suisse
On ne pouvait quitter la Suisse et conclure ce Top sans vous parler du chocolat Suisse ! Il faut rappeler que les Suisses détiennent la première place mondiale pour la consommation de chocolat devant l’Allemagne et le Royaume-Uni. Saviez-vous également qu’avant de devenir des grandes marques internationales, Philippe Suchard (Rocher, Toblérone, Milka), Henri Nestlé ou Rodolphe Lindt furent avant tout des pionniers du monde chocolatier. Henri Nestlé, c’est l’inventeur du chocolat au lait en 1875 !
Pour goûter au doux plaisir du chocolat neuchâtelois, un passage dans l’une des nombreuses chocolateries du canton s’impose. Le canton de Neuchâtel recense aujourd’hui plusieurs chocolatiers et confiseurs de renom. Au cœur de la vallée, au Creux du Van, on découvre la maison Jacot, la chocolaterie régionale. L’occasion d’une dégustation découverte !
Remerciements
Un grand merci à Jura Trois Lacs, Carole Rossé, Nicolas Luterbacher, Elise Boisson, Christine Domon, Yann Klauser, Maria-Luisa Wenger, Blaise Descombes et Philippe Martin pour leur accueil, leur convivialité et leur gentillesse. Nous gardons un très joli souvenir de ce moment passé à vos côtés.